Quelle dynamique d’électrification des différents usages constatez-vous ?
La projection à 2050 des actions à réaliser pour atteindre les objectifs de neutralité carbone est sans équivoque : 60 % de l’énergie finale devra provenir de sources électriques bas carbone. Cela implique une électrification massive des usages encore dépendants des énergies fossiles, notamment dans les transports, le bâtiment et l’industrie. La France connaît un certain retard pour atteindre cet objectif, avec une consommation d’électricité qui connaît actuellement une stagnation[1].
EDF est toutefois le témoin d’une dynamique réelle au niveau des entreprises, puisque nous avons signé 22 TWh de contrats industriels à moyen terme pour la fourniture d’électricité décarbonée jusqu’en 2028 avec des acteurs électro-intensifs pour des usines ou des centres de données, ainsi que deux contrats fermes de long terme. Ceci est permis par la transformation de notre politique commerciale, qui repose notamment sur le développement de contrats d’allocation de production nucléaire et permettra à nos clients de réduire significativement l’empreinte carbone de leur activité tout en maintenant la compétitivité de leurs sites.
Nous accompagnons également l’électrification des usages dans la mobilité ainsi que dans le bâtiment avec les pompes à chaleur, avec parfois des enjeux d’acculturation forts à résoudre auprès du grand public, par exemple pour l’adoption de la recharge bidirectionnelle des véhicules.
Pour que l’électrification soit efficiente et compétitive, EDF assume pleinement sa responsabilité industrielle : fournir une énergie disponible, compétitive et bas carbone. C’est l’objet de nos programmes qualité et de réduction des délais de mise à disposition (lead time), qui visent à sécuriser l’approvisionnement énergétique tout en facilitant l’évolution des usages vers des solutions électriques bas carbone.
Quelles sont les perspectives de production d’électricité décarbonée en Europe et comment EDF s’y inscrit-elle ?
L’électricité produite par EDF en France métropolitaine a une intensité carbone de seulement 3 gCO2/kWh au premier semestre 2025, ce qui donne une base solide pour réduire les émissions en électrifiant les usages. Cela bénéficie également aux autres pays européens grâce à l’interconnexion du réseau, qui nous permet d’exporter jusqu’à 100 TWh d’électricité par an.
Sur le nucléaire, un changement de ton a été opéré en Europe, porté par l’alliance européenne pour le nucléaire – au sein de laquelle la France est particulièrement motrice – et qui se traduit déjà par de nouveaux projets validés. EDF y trouve sa place tant sur les petits réacteurs modulaires (SMR) que sur les centrales de grande taille, à la fois en tant que développeur de projets de réacteurs complets et à travers ses filiales – telles Framatome ou Arabelle Solutions – sur la fourniture de briques technologiques ; le défi reste de pérenniser des designs sur étagère capables de rassurer les clients. Le groupe travaille également à renforcer sa compétitivité à travers l’augmentation de la durée de vie de ses centrales et de leur puissance, et la réduction des arrêts.
Concernant l’hydroélectricité, la fin du contentieux avec la Commission européenne va permettre de nouveaux investissements, par exemple pour l’agrandissement vertical de barrages ou encore la création de nouvelles Stations de Transfert d’Énergie par Pompage (STEP), qui amélioreront le pilotage fin du réseau. De tels investissements permettront au groupe d’assumer la fourniture de 150 TWh supplémentaires d’électricité à l’horizon 2035.
Ces engagements de capitaux par EDF remettent en mouvement des filières, avec des compétences françaises sources de souveraineté, générant de la valeur à l’export ainsi que des dizaines de milliers d’emplois dans nos territoires. Ces investissements s’accompagnent d’un soutien à la formation et à l’attractivité des emplois avec des initiatives telles que Forindustrie ou encore la création d’une école de soudage.
Au-delà du développement de nouvelles capacités, il s’agit également de préserver les actifs existants. Pour cela, EDF a lancé son programme ADAPT dans le nucléaire, et a dédié 818 M€ pour adapter ses différents moyens de production et de distribution au changement climatique en 2024.
Comment la biodiversité est-elle intégrée dans cette stratégie de développement ?
Les besoins d’eau pour le refroidissement sont gérés dans le respect des températures de rejet qui respectent les écosystèmes en aval. Les dérogations estivales sont exceptionnelles, nous ajustons plutôt la production. Pour ses projets d’énergie renouvelable, EDF s’appuie régulièrement sur les acteurs territoriaux pour identifier des terrains déjà transformés à utiliser sans nouvelle artificialisation.
Dans la conduite de ses activités hydroélectriques, le groupe adopte également une posture d’acteur engagé quant à la gestion et au partage de la ressource en eau entre ses différents usagers, qu’il s’agisse des populations, de l’agriculture, des entreprises ou de la biodiversité localisée aussi bien en amont qu’en aval des ouvrages. Cette posture de responsabilité représente, pour les équipes concernées, une composante de grande valeur de leur travail.
[1] La consommation totale d’énergie étant en baisse depuis 2021, la part de l’électricité dans la consommation continue toutefois à augmenter (NdlR).
Source : La Lettre d’EpE n° 78 – Octobre 2025
