Face au défi de la transition écologique, l’entreprise a un rôle clé. Parmi les solutions qu’elle développe, la sobriété est un levier de transformation de sa stratégie et de celle de la société, qu’elle commence à exploiter. Où en sommes-nous aujourd’hui en 2025 ? Quelles sont les politiques mises en œuvre et comment ont-elles porté leurs fruits dans les entreprises ?
Bilan 2022-2025 par Patrick Pouyanné, ex-Président d’EpE et Président-Directeur général de TotalEnergies
EpE a un rôle d’aiguillon et d’éclaireur pour les grandes entreprises françaises. Le thème de la sobriété est, avec la circularité, celui qui a marqué l’étude ETE 2030 ; il a fait l’objet d’un travail important mené ces trois dernières années, en générant échanges entre entreprises et parties prenantes sur la question « Que doit-on faire dans les prochaines années pour se mettre dans la démarche de neutralité carbone ? »
Au-delà, les 20 publications réalisées au cours des trois dernières années reflètent un travail intense qui a réuni plus de 1 500 collaborateurs de toutes les entreprises membres de l’association, et symbolisent la présidence de ces trois dernières années : faire en sorte que le développement durable ne soit pas seulement l’apanage des directeurs développement durable, mais s’inscrive dans la culture des entreprises et irrigue l’ensemble des métiers. Le lancement des comités-métiers a permis de mobiliser les différentes fonctions, étape indispensable à la démarche de neutralité carbone et de transition écologique qui est l’ambition collective.
La marque de fabrique d’EpE est de mettre en œuvre l’intelligence collective. Les membres partagent leurs expériences très concrètement et essaient de définir des ambitions et des axes de travail pour des avancées collectives, tout comme la création de coalitions sur des thèmes divers tels que la transition alimentaire dans les restaurants d’entreprises, la gestion de l’eau ou la mobilité douce. Le courage collectif est un moyen d’entraînement, porté par les CEO du Bureau dont Estelle Brachlianoff, Benoît Bazin et Catherine MacGregor, ainsi que par les membres, à travers l’association, elle-même reconnue par les pouvoirs publics puisque la Déléguée générale siège désormais au CESE.
L’urgence est scientifiquement démontrée sur les limites planétaires. Le véritable enjeu pour tous est de trouver le chemin et de garder le cap, comme affirmé dans la tribune collective signée de plus de 40 patrons de grandes entreprises françaises. Garder le cap sans renoncer, trouver les moyens pragmatiques d’avancer et faire que ce qui apparaît aujourd’hui comme une contrainte devienne une force. Les plus fiers et les plus engagés, ce sont les collaborateurs qui portent les entreprises dans cette démarche.
« Sur un plan personnel, je pense que je ne ressors pas exactement le même que ce que j’étais avant […] et mon entreprise non plus. Parce que bien évidemment, lorsque le PDG de TotalEnergies s’intéresse à l’environnement et prend la présidence d’EpE, ça a un effet d’entraînement dans l’entreprise. »
Feuille de route 2025-2028 par Estelle Brachlianoff, Directrice générale de Veolia et Présidente d’EpE
EpE est devenue un acteur de référence de la transition écologique avec une vision pragmatique, qui parle de solutions, d’actions et de concret, notamment avec ETE 2030. Le moment est charnière pour ces sujets de forte préoccupation actuelle. La tribune de dirigeants du 5 juin dit qu’il y a le choix entre renoncer ou réconcilier écologie et économie. Le sujet intéresse désormais les citoyens qui le vivent dans leur quotidien : inondations, grandes sécheresses, prix… On a changé d’échelle, les menaces sont concrètes et immédiates.
L’Europe a encore un peu d’avance sur certains sujets, pas sur d’autres, contrairement à la Chine où la transition écologique et les chantiers technologiques associés représentent 40 % de la croissance du PIB. Nombre d’entreprises européennes sont championnes dans leur métier avec un cadre réglementaire plutôt stable. La comparaison avec la Chine montre qu’il y a des opportunités à saisir. Innovations, technologies et brevets produisent déjà des résultats. En France, en dix ans, les émissions ont été réduites de 17 %, et la croissance a augmenté de 9 %. Ce qui prouve que, plutôt que ralentir ou abandonner, il faudrait accélérer sur un certain nombre de sujets. Les événements géopolitiques ont permis de redécouvrir les avantages concurrentiels de la transition.
Le sujet essentiel est de travailler à rendre accessible le pouvoir d’achat écologique des classes moyennes dans tous les secteurs de l’industrie. Pour EpE, cela signifie l’environnement pris dans son acception la plus large, donc, évidemment, atténuation carbone, économie circulaire, lien avec les territoires, et aussi adaptation, et enfin eau, sujet qui sera traité en plus des commissions existantes, car transverse à toutes les industries et qui rejoint le sujet de l’agriculture, des populations et des territoires. Les travaux d’EpE permettent d’avoir une vision holistique de la transition écologique.
La mesure de l’impact positif contribuera à cette dynamique collective. Les interactions et débats entre EpE, le secteur privé, les autres grandes entreprises et les parties prenantes, que ce soient les ONG, les associations, les institutions européennes ou la société civile, permettront d’aller plus loin, de transformer ce qui est en partie une contrainte en, potentiellement, un facteur de compétitivité et de souveraineté.
L’ambition pour ces trois prochaines années est de faire d’EpE l’avant-garde d’une transformation qui réconcilie écologie et économie, qui est dans l’action et dans l’accélération.
« J’ai une ambition qui est, avec les entreprises qui constituent EpE, de montrer et de faire savoir que les entreprises sont ou peuvent être acteurs de solutions, notamment par ce qu’elles apportent en matière d’innovation, d’efficacité, de mise en œuvre et de déploiement. »
Source : La Lettre d’EpE n° 77 – juillet 2025